L’inox (acier inoxydable) est un alliage de fer contenant au minimum 10,5 % de chrome et au plus 1,2 % de carbone. On peut y ajouter du nickel, du molybdène, du titane, du niobium, etc., pour adapter ses propriétés. Sa force vient d’un phénomène naturel : la formation d’une couche passive très fine d’oxyde de chrome (Cr₂O₃) qui protège l’acier de la corrosion et se reforme toute seule si elle est rayée, à condition qu’il y ait de l’oxygène et que la surface soit propre.
1) Pourquoi l’inox “ne rouille pas” (ou beaucoup moins) ?
- Couche passive : barrière continue contre l’eau et l’oxygène.
- Auto-cicatrisation : en cas de micro-rayure, la couche se reconstitue.
- Alliages “sur-mesure” : le nickel stabilise l’austénite (ductilité), le molybdène améliore la résistance en milieux chlorurés (bord de mer, eau salée), le titane/niobium stabilise le carbone (meilleures soudures).
Important : l’inox peut tacher (thé-staining) si la surface est contaminée (poussières d’acier carbone, sels, produits chlorés) ou si l’oxygène manque. Ce n’est pas une “rouille” structurelle, mais un défaut d’entretien/propreté de surface.
2) Les grandes familles d’inox (avec exemples courants)
A) Austénitiques (les plus utilisés)
- Nuances typiques : 304 / 304L (EN 1.4301 / 1.4307), 316 / 316L (EN 1.4401 / 1.4404), 316Ti (EN 1.4571).
- Non magnétiques à l’état recuit (deviennent parfois légèrement magnétiques après déformation à froid).
- Excellente formabilité et soudabilité.
- 316/316L (avec Mo) : plus résistants aux chlorures (bord de mer, piscines, stations d’épuration).
- Quincaillerie : A2 = 304, A4 = 316.
B) Ferritiques (économiques)
- Nuance courante : 430 (EN 1.4016).
- Magnétiques, bonne tenue en intérieur ou extérieur doux, mais moins résistants en milieu chloruré.
- Usages : habillages, déco, environnements non agressifs.
C) Martensitiques (durs)
- Ex. 410/420 (EN 1.4021 / 1.4028).
- Trempables, durs et résistants à l’usure, mais moins inoxydables.
- Usages : couteaux, pièces mécaniques.
D) Duplex (mi-austénitiques, mi-ferritiques)
- Ex. 2205 (EN 1.4462), 2304 (EN 1.4362).
- Très résistants aux chlorures et très résistants mécaniquement (haute limite d’élasticité).
- Usages : environnements marins/semi-industriels sévères, ouvrages sollicités.
3) Finitions & états de surface (impact esthétique, hygiène, glissance)
- 2B : fini laminé froid, mat uniforme — standard pour tôles industrielles.
- BA (Bright Annealed) : poli brillant “miroir d’usine”.
- Brossé satiné (grain 220/240) : très utilisé en architecture et cuisines.
- Poli miroir : décoratif, réduit les accroches (facile à nettoyer).
- Microbillé/antidérapant, damier/embossé : pour zones humides (rampe, passerelle).
Après soudure, réaliser décapage + passivation (chimique) pour réformer la couche passive et éviter des zones sensibles à la corrosion.
4) Inox vs acier galvanisé vs composite (en deux mots)
- Inox : anticorrosion dans la masse, hygiénique, durable, peu d’entretien ; coût initial supérieur mais TCO souvent favorable.
- Galvanisé : acier couvert de zinc (barrière + cathodique) ; très bon rapport qualité/prix, mais revêtement peut s’user (retouches) en milieux agressifs.
- Composite (SMC/FRP) : léger, non conducteur, anti-vol naturel ; excellent en milieux très corrosifs ou sensibles au bruit, mais comportement mécanique et UV à vérifier selon la norme/essais.
5) Comment choisir votre inox selon l’usage
- Intérieur sec / hygiène (alimentaire, pharma, cuisines) → 304/304L suffisent souvent ; 316L si produits chlorés/détergents agressifs.
- Bord de mer / eau salée / stations d’épuration → 316L ou Duplex 2205 pour une marge de sécurité.
- Piscines : attention aux chloramines (milieu très corrosif) → 316L bien conçu/ventilé, voire Duplex pour structures sollicitées.
- Passerelles, caillebotis, mains courantes en extérieur → 304 en milieu doux, 316L en zone littorale/humide.
- Couvercles/trappes étanches, caniveaux (cuisines, agro, chimie légère) → 316L recommandé (joints compatibles hydrocarbures si besoin).
- Charges élevées / fortes contraintes mécaniques (structures exposées + chlorures) → envisager Duplex.
6) Bonnes pratiques de fabrication & pose
- Éviter la contamination ferreuse : pas de brosses/abrasifs ayant servi sur acier carbone, pas de meulage voisin qui “poussière” la surface.
- Soudures : préférer L (Low Carbon) pour réduire la sensibilisation (304L/316L) ; décapage/passivation après soudage.
- Assemblages mixtes : attention aux couples galvaniques (inox + acier/zinc/cuivre) en milieu humide ; isoler électriquement si nécessaire.
- Drainage & ventilation : éviter les eaux stagnantes ; congés et pentes pour que l’eau s’écoule.
- Pose : affleurage à la cote finie (0 mm ± 2 mm), joint adapté (NBR si hydrocarbures), antidérapant en zones piétonnes.
7) Entretien (simple mais régulier)
- Nettoyage périodique : eau tiède + détergent neutre, éponge douce, rinçage abondant, essuyage.
- Proscrire : laine d’acier, brosses acier carbone, produits chlorés concentrés (eau de Javel), acides forts non contrôlés.
- Taches “thé-staining” : nettoyer avec un détergent spécifique inox ou une pâte légère non abrasive ; rincer et sécher.
- Après chantier : retirer poussières de meulage et projections qui amorcent la corrosion de surface.
8) Exemples d’applications (BTP & industrie)
- Caillebotis & passerelles inox : zones humides, usines agro, laboratoires, bords de mer.
- Caniveaux & avaloirs inox : cuisines professionnelles, abattoirs, laiteries, sites chimiques légers.
- Trappes/couvercles inox étanches : locaux sensibles aux odeurs ou aux hydrocarbures, toitures-terrasses techniques.
- Garde-corps, mains courantes, échelles crinolines : durables et esthétiques.
- Mobilier urbain : bornes, habillages, boîtiers — faible maintenance, esthétique pérenne.
9) FAQ express
L’inox, c’est toujours non magnétique ?
Non. Les austénitiques (304/316) sont peu ou pas magnétiques à l’état recuit, mais peuvent l’être légèrement après déformation. Les ferritiques/martensitiques sont magnétiques.
304 vs 316, je prends quoi ?
304 pour milieux doux (intérieur/extérieur urbain). 316/316L en présence de chlorures (littoral, eau salée, produits dégraissants/piscines).
Que signifie le “L” (304L, 316L) ?
Low Carbon (faible carbone) : mieux pour la soudabilité et la résistance à la corrosion intergranulaire.
L’inox rouille-t-il ?
La couche passive protège l’alliage. Des taches peuvent apparaître si la surface est contaminée ou mal entretenue ; elles se traitent par nettoyage + passivation si besoin.
A2/A4, c’est quoi ?
Classements de visserie : A2 ≈ 304, A4 ≈ 316 (mieux en milieu marin/chloré).
10) Check-list d’achat “chantier”
- Nuance adaptée : 304/304L (standard), 316/316L (chlorures), Duplex (fortes sollicitations).
- État de surface : brossé (visuel), 2B/BA (industrie), antidérapant (sécurité).
- Accessoires : joints (NBR si hydrocarbures), verrouillage, charnières, kits de pose.
- Documents : certificat matière (EN), traçabilité, notice d’entretien.
- Précautions de pose : outillage dédié inox, passivation après soudures, isolation galvanique si métaux différents.
À retenir
- L’inox doit sa durabilité à sa couche passive — efficace si la surface est propre et oxygénée.
- 304/304L couvrent la majorité des usages ; 316/316L prennent le relais en milieux chlorés ; Duplex pour conditions sévères.
- En TCO, l’inox offre un excellent rendement : peu d’entretien, esthétique durable, hygiène irréprochable.
- La qualité de fabrication et de pose (décapage/passivation, propreté, affleurage, joints) fait 50 % du résultat.